
Combien gagne un propriétaire de camping en France : entre passion et rentabilité estivale
Le camping, ce rêve un peu bohème devenu business
Imaginer des matins bleus au chant des cigales, les pieds nus sur la terre fraîche, un café fumant à la main face aux premières arrivées de vacanciers — voilà ce que rêve plus d’un amoureux de nature et de liberté lorsqu’il imagine devenir propriétaire d’un camping. L’image est douce, doucement rustique, presque idyllique. Mais derrière cette carte postale un brin romantique, se cachent des réalités économiques bien précises. Alors, un propriétaire de camping en France, gagne-t-il bien sa vie ? Et à quel prix du silence, de la sueur et des nuits à jongler entre tables de réservation et petits bobos du quotidien ?
Portrait-robot d’un propriétaire de camping français
Ce ne sont pas toujours des professionnels de l’hôtellerie qui se cachent derrière les barrières peintes à la main de nos campings préférés. Beaucoup sont d’anciens cadres en reconversion, des couples revenus de grandes métropoles pour retrouver du sens, ou encore des amoureux du plein air devenus aventuriers de la gestion touristique.
Les campings en France, ce sont plus de 7 500 établissements recensés, allant du petit terrain familial de dix emplacements au parc de mobil-homes luxueux avec piscine à débordement, restaurant bio et animations yoga à l’aurore. Autant dire que les revenus possibles fluctuent tout autant que les couchers de soleil sur les Cévennes.
Combien ça rapporte, vraiment ? Les chiffres dans le détail
Parlons chiffres, car l’on ne vit pas d’amour et de barbecue grillé chaque soir. Le revenu d’un propriétaire de camping dépend de plusieurs facteurs :
- La taille de l’établissement : Un camping de 50 emplacements ne générera évidemment pas les mêmes recettes qu’un domaine de 300 places équipé de mobil-homes dernière génération.
- La localisation : Un terrain dans les Landes ou en bord de Méditerranée aura un taux d’occupation bien plus élevé qu’un site en zone rurale peu touristique.
- Le niveau de prestation : Campings étoilés, labelisés « écolodge » ou à thème (vintage, insolite, naturiste…) attirent une clientèle spécifique et fidèle, prête à payer davantage.
Et maintenant, à vos calculettes ! Un camping de taille moyenne (environ 100 emplacements), bien situé et correctement géré, peut atteindre un chiffre d’affaires annuel de 300 000 à 600 000 euros. Mais attention, cela ne signifie pas que le propriétaire se frotte les mains avec des billets plein les poches.
Après les charges (salaires des saisonniers, entretien du site, électricité, taxes, remboursements d’emprunts, etc.), le revenu net pour le propriétaire oscille souvent entre 30 000 et 80 000 euros par an, en fonction bien sûr de la taille de l’établissement, de sa gestion et de ses investissements.
Quand la haute saison rythme le cœur du métier
Derrière les rires d’enfants sautant dans la piscine et les odeurs de saucisses grillées, il y a une vérité brute : l’été est une course contre la montre. Le camping bat son plein entre juillet et août, période qui peut représenter jusqu’à 70 % du chiffre d’affaires annuel. Chaque emplacement doit être optimisé, chaque vacancier choyé, chaque détail anticipé.
Victoire, une propriétaire rencontrée dans l’Hérault, me raconte : « L’été, je n’ai plus de prénom. Je suis ‘la dame du camping’. Je me lève avec le soleil et je dors quand tout le monde ronfle. Mais j’adore ça. C’est vivant, intense. Et si tu gères bien, ça peut payer un hiver serein. »
L’hiver, entre repos, travaux et stratégie
Quand les hamacs se rangent et que les toiles de tente se replient sur les souvenirs des derniers vacanciers, ce n’est pas le monde qui s’arrête. C’est la saison de l’ombre, celle où l’on prépare la suivante. Remise en état des sanitaires, planification des animations, gestion administrative, campagne de communication… Et parfois aussi, un peu de repos bien mérité.
Certains propriétaires louent leurs terrains à des résidences mobiles à l’année. D’autres investissent dans des hébergements insolites pour diversifier leurs offres et rallonger la saison (tipis chauffés, cabanes perchées, tiny houses…). Les plus créatifs s’autorisent même à accueillir des retraites de yoga, des séminaires ou des événements culturels hors saison touristique. Autant de leviers de rentabilité… et d’expression personnelle.
Investissement initial : l’aventure commence ici
Avant d’espérer faire fortune au chant des grillons, il faut avoir les reins solides. Acquérir un camping coûte cher. Très cher parfois. Le prix varie selon l’emplacement, le nombre d’emplacements, l’état des infrastructures, la notoriété du site… mais comptez rarement moins de 300 000 € pour un petit camping, et jusqu’à plusieurs millions pour un grand complexe étoilé dans une zone prisée.
La majorité des porteurs de projet passent par des emprunts importants. Et la rentabilité ne s’installe pas en une saison. Il faut parfois plusieurs années pour stabiliser l’activité, fidéliser la clientèle et absorber les coûts initiaux. Certains n’y parviennent pas — d’autres refleurissent d’une manière inattendue, réinventant le concept même de camping.
Quand la passion devient business (et vice versa)
Nous avons le camping dans notre imaginaire collectif. C’est un monde de bivouacs, de jeux de société à la lumière d’une lampe tempête, d’improbables amitiés créées autour d’un tournoi de pétanque ou d’une cafetière partagée. Mais aujourd’hui, ce monde se modernise, s’adapte, se professionnalise. Les enjeux marketing, écologiques et réglementaires deviennent centraux.
Et pourtant… les meilleurs campings restent souvent ceux où l’on sent la main du propriétaire derrière chaque détail. Une touche de décoration faite main dans les sanitaires, une soirée contes improvisée sous la tonnelle, ou ce petit mot laissé au départ : « Merci d’avoir rêvé sous nos étoiles. Revenez quand vous voudrez. »
Le prix de la liberté ? Une vie pleine, pas toujours facile
Diriger un camping, ce n’est pas une sinécure. C’est un engagement de tous les instants, fait d’aléas climatiques, de locataires tatillons, de réglementations parfois kafkaïennes. Mais c’est aussi un des rares métiers qui permet de mêler gestion, nature, lien humain et créativité.
Ceux qui s’y engagent le font rarement par hasard. Beaucoup y trouvent une forme d’alignement, un rythme de vie plus en phase avec leur nature profonde. Une manière, peut-être, de cultiver l’art de l’hospitalité dans une époque qui en manque parfois cruellement.
Alors, combien gagne un propriétaire de camping ? Assez pour vivre décemment, parfois confortablement. Mais surtout, assez pour se coucher chaque soir avec la sensation étrange — et précieuse — de faire partie des souvenirs d’inconnus venus goûter, un court instant, à un petit coin de paradis.